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ROBERT ALDRICH - FILMOGRAPHIE 1953 - 1964


 

1954 ALERTE À SINGAPOUR (World for ransom)

Détective privé à Singapour, Mike Callahan a connu pendant la guerre la belle Frennessey, qui l’a délaissé pour épouser son ami Julian March. La jeune femme, qui se produit comme chanteuse dans un cabaret de la ville, appelle Mike à son secours car elle craint que son mari ne soit impliqué dans une affaire louche. Après avoir vainement interrogé Julian, Mike est agressé par un gangster, puis découvre que Julian a été engagé par le louche Alexis Pederas pour kidnapper Sean O’Connor, un physicien nucléaire, afin de le revendre aux plus offrants : les Occidentaux, les Russes ou les Chinois. Wong, ami de Mike, a pu photographier Julian, habillé en militaire, en compagnie d’O’Connor, dans la voiture qui l’enlevait. Wong est assassiné par Guzik, homme de main de Pederas, qui fait cacher la photographie dans la chambre de Mike pour le compromettre. Mike réussit à fausser compagnie à l’inspecteur McCollum et se cache chez Frennessey. Contre la promesse de celle-ci de lui revenir s’il ramène Julian vivant, Mike s’enfonce dans la jungle à la recherche de l’endroit où O’Connor est retenu prisonnier. Le major Bone, qui a des doutes sur la culpabilité de Mike, le fait suivre.
Après l’avoir rejoint, convaincu de son innocence, il s’associe à lui pour délivrer O’Connor, détenu dans le petit village d’Ipoh. Bone est abattu tandis que Mike réussit à sauver O’Connor, mais est contraint de tuer Julian et ses complices à l’aide de deux grenades. Revenu auprès de Frennessey, il est rejeté par elle, inconsolable de la perte de Julian.

Réalisation et production Robert ALDRICH (1954)
Scénario Lindsay HARDY & Hugo BUTLER
Directeur de la photographie Joseph BIROC
Musique Frank DE VOL
Décors Ted OFFENBACHER
Production Bernard TABAKIN - Plaza Prod
Distribution Columbia (en France)
Durée 82 minutes

Dan DURYEA (Mike Callahan)
Marian CARR (Frennessey March)
Patric KNOWLES (Julian March)
Alexis Pederas (Gene LOCKHART)
Reginald DENNY (Le major Bone)
Nigel BRUCE (Le gouverneur Coutts)
Arthur SHIELDS (Sean O’Connor)
Douglass DUMBRILLE (L’inspecteur McCollum)
Keye LUKE (Wong)
Clarence LUNG (Chan)
Lou NOVA (Guzik)
Carmen D’ANTONIO (La danseuse)

ALERTE À SINGAPOUR est le second film réalisé par Robert Aldrich et celui qui le fit connaître en France — son premier film, THE BIG LEAGUER (1953) étant demeuré inédit. Aldrich travaillait alors à la série télévisée intitulée “China Smith” pour la firme ABC ; il décida de réaliser un film pour le grand écran avec la même équipe, Dan Duryea, principal interprète, le co-producteur Bernard Tabakin, et Joseph Biroc, qui allait devenir son chef opérateur le plus fidèle avec quinze films, de ATTAQUE (1956) à DEUX FILLES AU TAPIS (All the Marbles, 1981). Par la suite, Dan Duryea poursuivit la série télévisée jusqu’en 1958. Le tournage dura onze jours seulement mais dut être interrompu par manque d’argent. Afin de pouvoir le terminer, Aldrich dirigea quelques films publicitaires pour des marques de bières et de rasoirs. La critique discerna aussitôt chez le jeune cinéaste un tempérament original de créateur. Aldrich, qui avouait beaucoup aimer le film, s’était en effet permis quelques libertés qui lui valurent ses premiers ennuis avec la censure : « Je voulais montrer que la fille que Callahan aime est aussi une lesbienne, expliquait-il quelques années plus tard. Il y avait une scène où elle chantait dans une boîte de nuit habillée en homme et, pendant qu’elle chantait, elle embrassait une fille sur la bouche. Cette séquence a été coupée et cet aspect de la fille a disparu. » (in “Cinéma 58” n° 27, mai 1958).


1954 APACHE (Bronco Apache)

Le jour de la reddition de Geronimo, Massai, un jeune guerrier, refuse d'abandonner le combat contre l'armée américaine. Vite arrêté, il est conduit en train vers la réserve de Floride où seront gardés Geronimo et ses guerriers apaches. Mais Massai s'enfuit et se retrouve dans une grande ville de Blancs St Louis. Il décide de regagner sa terre natale. Chemin faisant, il rencontre Dawson, un Indien "civilisé", qui lui donne des grains de blé. De retour chez lui, Massai va voir Nalinle, la fille qu'il aime. Mais Santos, le père de celle-ci, dénonce Massai. Il est arrêté par le scout Al Sieber et l'Apache renégat Hondo, à qui Santos a promis sa fille. Massai réussit à s'évader et se venge. Croyant que Nalinle l'a trahi, il l'enlève. Il commence alors sa guérilla personnelle, semant la panique et le désordre. Mais Sieber et Hondo le traquent. Massai se réfugie alors au pied de la montagne apache avec Nalinle et sème le blé de Dawson. Les mois passent. Nalinle attend un enfant. Alors qu'elle va accoucher les soldats arrivent, conduits par Sieber et Hondo. Massai livre son dernier combat. Blessé, il est cerné dans son champ de blé. Soudain retentit un cri : l'enfant est né. Massai jette ses armes et court vers la cabane. Il a renoncé à se battre.

Réalisation Robert ALDRICH (1954)
Scénario James R WEBB
D'après le roman "Bronco Apache"de Paul I WELLMAN
Directeur de la photographie Ernest LASZLO
Décors Nicolaï REMISOFF
Musique David RAKSIN
Production Harold HECHT et Burt LANCASTER
Distribution United Artists
Durée 91 minutes

Burt Lancaster (Massai)
Jean Peters (Nalinle)
John McIntire (Al Sieber)
Charles Bronson (Hondo (sous le nom Charles Buchinsky) John Dehner (Weddle)
Paul Guilfoyle (Santos)
Ian MacDonald (Clagg)
Walter Sande (Lt. Col. Beck)
Morris Ankrum (Dawson)
Monte Blue (Geronimo)

ANECDOTES

- C'est le premier "grand" film de Robert Aldrich et l'un des premiers westerns "pro-Indiens" avec LA FLÈCHE BRISÉE d'Anthony Mann. Ce film, qui avait quinze ans d'avance sur son temps (comme ATTAQUE, pour le film de guerre) eut beaucoup de succès. Aldrich tourna deux fins : dans l'une d'elles, Massai était tué à la fin (en cela fidèle au roman). Mais United Artists utilisa la seconde, préférant un "happy end" plus satisfaisant pour le téléspectateur, malgré l'opposition de Lancaster et du "gros Bob". La même année, Lancaster produisait un autre film d'Aldrich : VERA CRUZ, dans lequel il s'opposait à Gary Cooper. Autre très gros succès qui faisait d'Aldrich l'un des cinéastes les plus prometteurs de l'époque. Vingt ans plus tard, Aldrich tournait FUREUR APACHE, nouvelle version de BRONCO APACHE, mais cette fois Lancaster tenait le rôle de John McIntire et les Indiens étaient montrés comme des brutes sanguinaires et féroces ! Le film, à contre-courant fit scandale ! Hondo, l'Indien renégat, est interprété par Charles Buchinsky qui, peu de temps après, changeait son nom en celui de Charles Bronson !

- Troisième film d’Aldrich dans sa période de plus intense créativité. Le film est un jalon important du western moderne par son sujet et la réflexion qu’il comporte. Son personnage principal : un Indien et, qui plus est, un Indien observé avec sympathie et respect par l’auteur. Anthony Mann (Devil’s Doorway, 1950) et Delmer Daves (Broken Arrow, 1950) avaient déjà montré de semblables personnages, mais ici l’Indien a nettement plus de caractère, de relief, de densité psychologique que les précédents. Le propos de l’oeuvre ne manque pas de subtilité. Aldrich dépeint un cas d’individualisme absolu, mélange de paranoïa et de lucidité. Le héros affirme que tous les Blancs et tous les Indiens sont ses ennemis et qu’il n’en a plus pour longtemps à vivre, ce qui est vrai, à la fois subjectivement et objectivement. Grâce à la femme qui l’accompagne, élément d’équilibre positif mais insuffisant, il est en passe de recréer une civilisation à lui tout seul, à l’écart des deux peuples. Aldrich sait rendre sensible l’aspect lyrique et presque exaltant de cette tentative, mais aussi son côté désespéré et suicidaire. La fin heureuse n’est évidemment pas celle qu’avait voulue Aldrich : Massaï devait être abattu par un scout indien de l’armée, qui convoitait sa femme. Les Artistes Associés imposèrent une deuxième fin qui fut d’abord rejetée, puis acceptée par Lancaster, coproducteur du film. Elle est si artificielle – en fait le récit donne surtout l’impression d’être inachevé – qu’elle n’est guère gênante, le spectateur se sentant pratiquement obligé de rétablir mentalement un dénouement tragique, seule conclusion possible à l’entreprise de Massaï. Comme plus tard dans Run of the Arrow, le western met ici en valeur un personnage d’exclu, placé dans une situation inextricable qui résume poétiquement et tragiquement les conflits historiques d’une époque

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1954 VERA CRUZ (Bronco Apache)

1866. La révolution fait rage au Mexique. Le marquis de Labordère propose à deux aventuriers américains, Benjamin Trane et Joe Erin, de combattre pour son maître l'empereur Maximilien. Ancien colonel de l'armée sudiste, Trane n'a plus rien à perdre. Il accepte donc. Quant à Joe Erin, il rejoint avec ses hommes les forces de Maximilien, décidé à prendre part à la guerre civile mexicaine dans le camp qui paiera le plus.
Trane et Erin reçoivent pour mission d'escorter jusqu'à Vera Cruz la comtesse Marie Duvarre mais ils découvrent vite que celle-ci transporte dans sa voiture trois millions de dollars en or destinés à lever de nouvelles troupes en Europe et à maintenir l'Empereur sur le trône. La comtesse propose alors aux deux hommes de partager l'or en trois...
Mais le marquis de Labordère parvient à récupérer l'or. Trane et Erin rejoignent les rangs des rebelles juaristes, décidés à combattre aux côtés du général Aguilar pour récupérer l'or. Mais Nina, une jeune mexicaine, parvient à gagner Trane à la cause de Juarez. Erin s'empare de l'or et s'enfuit. Trane le rejoint et lui demande de se rendre. Erin refuse, Trane le tue et rend l'argent aux rebelles.

Réalisation Robert ALDRICH (19S4)
Scénario Roland KIBBEE, James R WEBB
D'après l'histoire de Borden CHASE
Directeur de la photographie Ernest LASZLO
Musique Hugo FRIEDHOFER
Production James HILL/Harold HECHT / B LANCASTER / Artistes Associés
Durée 94 minutes

Gary COOPER Benjamin Trane
Burt LANCASTER Joe Erin
Denise DARCEL La comtesse Marie Duvarre
Cesar ROMERO Le marquis de Labordère
Sarita (Sara) MONTIEL Nina
George McREADY L'empereur Maximilien
Ernest BORGNINE Donegan
Morris ANKRUM Le général Aguilar
Jack LAMBERT Charlie
Henry BRANDON Danette
Charles BUCHINSKY Pittsburgh
Jack ELAM Tex

Tourné au Mexique. VERA CRUZ est avant tout la rencontre de deux géants du cinéma américain : Gary Cooper et Burt Lancaster. C'est aussi le dernier film dans lequel l'acteur Charles Buchinsky apparaît sous son vrai nom. On le connaît mieux aujourd'hui sous son nouveau nom de bataille... Charles Bronson. Sarita Montieel était la femme du réalisateur Anthouy Mann à qui on doit notamment L'HOMME DE L'OUEST avec Gary Cooper et L'APPÂT avec James Stewart.
En 1970, Tony Curtis, Charles Bronson et Michèle Mercier tournèrent sous la direction de Peter Collinson un film d'aventures, LES BAROUDEURS, remake déguisé de VERA CRUZ !

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1955 KISS ME DEADLY (en quatrième vitesse)

Une nuit, le détective privé Mike Hammer prend en stop une jeune femme blonde, Christina, qui s'est échappée d'un asile psychiatrique. Elle est absolument terrifiée; des gangsters sont soi-disant à ses trousses, mais ses propos restent mystérieux et obscurs. A la suite d'un accident de voiture, Christina est tuée et Mike se retrouve à l'hôpital. Intrigué, il décide d'effectuer une enquête. Seul indice laissé par Christina : la référence à un poème, signé Christina Rossetti, son surnom. Alors qu'il cherche à résoudre l'énigme, il rencontre Lily Calver, puis Evello, le chef d'une bande de redoutables gangsters. Tout le monde semble à la recherche d'une mystérieuse mallette. Les hommes du FBI mettent Mike au courant : la mallette contient un dangereux minerai radioactif, volé pour le compte d'une puissance étrangère. Velda, la secrétaire de Mike, est enlevée par les gangsters, mais il poursuit son enquête : dans une maison au bord de la plage, il affronte une dernière fois Lily Calver qui tue le véritable chef de la bande, le Dr Soberin. Mais, en ouvrant la mallette, elle déclenche une explosion atomique. Mike et Velda s'échappent vers la plage, tandis que la maison est la proie des flammes.

Réalisateur Robert Aldrich
Auteur Mickey Spillane (Roman)
Scénariste A.I. Bezzerides
CompositeurF rank De Vol
Directeur de la Photographie Ernest Laszlo
Société de distribution Action Cinémas / Théâtre du Temple
Production Parklane Pictures Inc.

Albert Dekker (Dr Soberin)
Ralph Meeker (Mike Hammer)
Cloris Leachman (Christina Bailey)
Gaby Rodgers (Gabrielle)
Marian Carr (Friday)
Maxine Cooper (Velda)
Paul Stewart (Carl Evello)

Cette vertigineuse parabole sur la menace atomique (contenant des allusions au MacCarthysme) présentait une étonnante galerie de "méchants" : Jack Lambert, Jack Elam, Albert Dekker, etc. Le générique défilant à l'envers, la référence à la boîte de Pandore, des angles insolites, un récit haché et haletant, un "suspense" inquiétant et violent, tels sont les "ingrédients" qui firent le succès du film, l'un des plus représentatifs du "film noir" des années 50. EN QUATRIÈME VITESSE révéla Aldrich en Europe, dont lesfilms marquants dans les années 54-56 furent : BRONCO APACHE, VERA CRUZ, LE GRAND COUTEAU et ATTAQUE. Vingt ans plus tard, Aldrich revenait au "policier" pur avec LA CITÉ DES DANGERS (1975) avec Burt Reynolds et Catherine Deneuve. Les temps changent, le héros était encore plus désabusé. En 1977, BANDE DE FLICS avait un contenu très ambigu.

Le détective privé Mike Hammer est le héros de nombreux romans de Mickey Spillane. Dans TOUS EN SCÈNE (1952), Minnelli s'amusa à le caricaturer dans le ballet "Girl Hunt" dansé par Fred Astaire et Cyd Charisse. En 1963, Mickey Spillane incarnait lui-même son héros dans SOLO POUR UNE BLONDE (The Girl Hunters), film de Roy Rowland.

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1956 THE BIG KNIFE (Le grand couteau)

Nous sommes à Bel-Air, dans la luxueuse résidence de Charlie Castle, célèbre acteur de cinéma qui est à un tournant de sa carrière. Sa femme, Marion, est sur le point de le quitter, lui reprochant sa vie dissolue et sa faiblesse envers son producteur, le perfide et retors Stanley Hoff. Celui-ci survient précisément pour arracher à sa vedette la signature d'un contrat qui le lie à lui pour sept ans. Un chantage l'y aide : Charlie a en effet sur la conscience le meurtre accidentel d'une fillette, alors qu'il conduisait en état d'ivresse et en galante compagnie. L'affaire a été étouffée mais va rebondir à la suite des bavardages d'une figurante sans malice, Dixie. La presse à scandale s'en mêle... Pris entre sa femme qui le pousse à tout quitter et son producteur prêt à toutes les compromissions, Charlie tergiverse. Jusqu'au moment où l'on apprend que Dixie a été trouvée morte - accidentellement, bien sûr... A bout de nerfs, prenant enfin conscience de sa veulerie et du milieu corrompu qui est le sien, Charlie s'ouvre les veines dans sa salle de bains. Smiley, le bras droit du producteur, dicte aux journalistes une version habilement édulcorée de l'événement. Tout le monde paraît satisfait. Saut Marion qui, seule au centre de la pièce, hurle son désespoir...

Production et réalisation Robert ALDRICH (1955)
Scénario James POE
D'après la pièce de Clifford ODETS
Directeur de la photographie Ernest LASZLO
Décors William GLASGOW
Musique Frank DEVOL
Directeur de production Jack R BERNE
Durée 111 minutes

Jack PALANCE Charlie Castle
Ida LUPINO Marion Castle
Rod STEIGER Stanley Hoff
Shelley WINTERS Dixie
Wesley ADDY Hank
Wendell COREY Smiley Coy
Everett SLOANE Nat
Paul LANGTON Buddy Bliss
Jean HAGEN Connie Bliss
Ilka CHASE Patty Benedict
Nike WINKELMAN Billy

LE GRAND COUTEAU est l'adaptation à l'écran, par Robert Aldrich (qui venait de signer coup sur coup deux films importants : VERA CRUZ et EN QUATRIEME VITESSE), d'une pièce de Clifford Odets jouée avec succès à Broadway. Jean Renoir l'a mise en scène en France en 1957 au Théâtre des Bouffes-Parisiens, avec Daniel Gélin (Charles Castle), Claude Génia (Marion) et Paul Bernard (Marcus Hoff). C'est une satire corrosive de la décadence de certains milieux cinématographiques américains. Il existe une tradition de films dans lesquels " Hollywood juge Hollywood " (BOULEVARD DU CRÉPUSCULE, LES ENSORCELES, UNE ÉTOILE EST NEE, LE DERNIER NABAB, FEDORA, etc.). Rarement cela fut fait avec une telle violence. A noter un clin d'oeil de l'auteur, saluant ses pairs dans cette répartie de Charlie à son producteur : "Oui, il y a des films américains qui signifient quelques chose. Ils sont signés Stevens, Mankiewicz, Kazan, Huston, Wyler, Wilder ou Stanley Kramer... mais certainement pas Stanley Hoff! "

1956 ATTACK (Attaque)

1944, en Europe : la première compagnie américaine dite " Fragile Fox " est cantonnée en Belgique. Le capitaine Cooney est vivement critiqué par ses deux lieutenants, Costa et Woodruff, en raison de sa lâcheté. Par sa faute, beaucoup d'hommes sont morts inutilement. Mais le colonel Bartlett protège Cooney, dont le père lui sera utile après la guerre. Cooney refuse d'engager sa compagnie lorsqu'on lui confie une mission dangereuse. Costa et sa section sont chargés de cette mission. L'objectif est atteint après une progression sanglante : la " Petite Maison " est prise d'assaut et des Allemands sont faits prisonniers. Mais la position se révèle intenable : Cooncy, sollicité par radio, refuse de soutenir la section. Cooney, terrifié, devient de plus en plus abject et s'énivre. Contre-attaque allemande : les positions américaines sont pilonnées. Costa échappe à deux chars allemands, mais l'un de ses bras a été écrasé. Il rejoint dans une cave Cooney, Woodruff et les débris de la compagnie qui s'est repliée. Il meurt sans trouver la force de tuer Cooney, qui voulait se rendre. Woodruff abat Cooney, soutenu par ses hommes qui tirent sur le cadavre. Le colonel Bartlett comprend ce qui s'est passé, mais ferme les yeux. Lorsqu'il propose de donner une médaille à Cooney à titre posthume, Woodruff décide de dire la vérité.

Réalisation Robert ALDRICH (1956)
Scénario James POE
D'après la pièce " The fragile fox " de Norman BROOKS
Directeur de la photographie Joseph RIROC
Direction artistique William GLASGOW
Musique Frank De VOL
Production Robert ALDRICH (Associates and Aldrich)
Durée 107 minutes

Jack PALANCE Lieutenant Costa
Eddie ALBERT Capitaine Cooney
Lee MARVIN Colonel Bartlett
Robert STRAUSS 1er classe Snowden
Buddy EBSEN Sergent Tolliver
Strother MARTIN Sergent Ingerso
Steven GERAY 1er Allemand
William SMITHERS Lieutenant Woodruff
Jon SHEPODD Caporal Jackson
Peter Van EYCK 2e Allemand

TTAQUE fait partie des 5 films d'Aldrich qui le révélèrent en Europe dans les années 54-56 et qui firent de lui l'un des cinéastes les plus adulés par la jeune critique française. Il fut projeté à la Biennale de Venise 1956, malgré l'hostilité de l'ambassadeur américain (l'armée américaine étant présentée sous un jour peu favorable) et reçut le Prix de la critique italienne. Le film obtint un très gros succès. En 1956 également, Anthony Mann réalisait COTE 465, autre film sans concessions sur la guerre; en 1957, c'était AMERE VICTOIRE de Nicholas Ray. Réalisé avec peu de moyens, ATTAQUE dénonçait avec efficacité la guerre et son absurdité. Onze ans plus tard,, Aldrich revenait au film de guerre avec DOUZE SALOPARDS, au gros budget et à la distribution éclatante (Lee Marvin était de nouveau présent). Le succès fut énorme, malgré un propos beaucoup plus ambigu et une présentation de la violence assez trouble. En 1970, Aldrich traitait pratiquement le même sujet, avec les mêmes ambiguïtés, dans TROP TARD POUR LES HÉROS, avec Michael Caine et Cliff Robertson. Depuis 1955, est le producteur de la plupart de ses films; dans les années 60 il fut le seul réalisateur américain à posséder ses propres studios !


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"Le sujet tient en une phrase : un capitaine en proie aux affres de la peur refuse de soutenir ses hommes lors d'une attaque, en laissant quelques-uns se faire massacrer. Un huis clos psychologique sur les rapports de pouvoir et de devoir va se jouer entre quatre officiers, avec pour point d'orgue la lâcheté d'un homme. Le capitaine se cantonne dans son baraquement sombre comme une caverne. Sur la structure, le film ressemble à une tragédie grecque : chacun expose ses positions et essaie de les argumenter ­ le capitaine ira jusqu'à expliquer, larmoyant, que son père le fouettait pour qu'il devienne un homme. Plus que la guerre, c'est le jeu des consciences qui mine le moral de chacun. A la même époque (en 1957), Kubrick réalisait Les Sentiers de la gloire, un film où il était aussi question de la lâcheté et de la responsabilité morale de l'officier. A la différence près que chez Kubrick, c'est au tribunal que l'on juge ; alors que chez Aldrich, ce sont les hommes (puisqu'il n'est question que de cela : être un homme) qui rendent la justice de la guerre et non celle ordonnée par l'Etat. Le QG où sont rassemblés les officiers est un monde à lui seul : un Etat de guerre. Quand, à la fin, le colonel prononce d'un air entendu "A tout à l'heure", cela nous conforte dans l'idée qu'avant d'être une affaire entre Etats, la guerre est une histoire de droit privé. Aldrich dresse un sombre portrait de ces combattants qui se doivent de régler d'abord leurs comptes entre eux ­ comme deux villageois se disputent un terrain devant le maire ­ avant d'en découdre avec l'adversaire. L'ennemi n'est pas toujours en face, mais parfois enfoui en notre propre corps. Le lieutenant Costa, héros malheureux, n'arrivera pas à tuer le capitaine qui l'avait abandonné sur le champ de bataille. Il mourra la bouche ouverte, figé dans une posture rappelant la peinture de Bacon : face aux horreurs de la guerre, on reste le plus souvent muet ou hébété. "L'avenir de l'armée est aux coureurs à pied", dira un soldat. Tout dépend de la direction dans laquelle on court..."
Les inrocks

1959 TEN SECONDS TO HELL (Tout près de Satan)

Berlin, 1945. Six soldats allemands démobilisés s'engagent dans un périlleux service de déminage. Un accord est conclu entre eux : chacun versera la moitié de sa paye dans une caisse commune qui, au bout de six mois, sera partagée entre les survivants... Amis de longue date, Koertner et Wirtz s'opposent sur le plan du caractère : le premier est un idéaliste plein de compassion, le second un égocentrique et un cynique. Leur rivalité s'accroît du fait qu'ils sont l'un et l'autre attirés par leur séduisante logeuse, une veuve de guerre française prénommée Margot. Petit à petit, le groupe s'amenuise : Globke est tué alors qu'il tentait de désamorcer une bombe anglaise à double percussion; Tillig périt à son tour; puis, c'est le tour de Sulke, qui laisse une veuve et un enfant, Koertner et Loeffler sont prêts à faire cadeau de leurs parts à la jeune veuve, mais Wirtz refuse. Écoeurée par son comportement, Margot se rapproche de Koertner et le supplie d'abandonner ce travail trop dangereux. Un matin, Koertner sauve la vie de Wirtz au cours d'un déminage difficile. Quelques instants plus tard, Wirtz tente de tuer son camarade. Koertner laisse alors Wirtz seul avec la bombe qu'il doit désamorcer, certain qu'il va se tuer. Quant à lui, il reprendra sa carrière d'architecte et poursuivra sa vie aux côtés de Margot...

Réalisation Robert ALDRICH (1959)
Scénario Robert ALDRICH, Teddi SHERMAN
D'après le roman - The Phoenix" de Lawrence P BACHMANN
Directeur de la photographie Ernest LASZLO
Musique Kenneth V JONES
Direction artistique Ken ADAM
Production Michael CARRERAS, Seven Arts-Hammer
Distribution United Artists
Durée 93 minutes

Jack PALANCE Koertner
Jeff CHANDLER Kari Wirtz
Martine CAROL Margot Heifer
Robert CORNTHWAITE Loeffler
Dave WILLOCK Tillig
Wesley ADDY Sulke
Jimmy GOODWIN Globke
Virginia BAKER Frau Bauer
Richard WATTIS Le major Haven
Nancy LEE Ruth Sulke

Robert Aldrich, qui était en disgrâce à Hollywood (il venait d'être renvoyé du plateau de RACKET DANS LA COUTURE par le patron de la Columbia, Harry Cohn), devait tourner deux films en Europe au cours de l'année 1959 : TOUT PRÈS DE SATANproduitpar la fameuse Hammer Films (la compagnie qui apporta son renouveau au fantastique britannique) et TRAHISON A ATHENES. Mais le cinéaste rencontra de grandes difficultés dans ses rapports avec Michael Carreras, le directeur de la Hammer, qui amputa le film de près dune demi-heure (il totalisait 131 minutes au départ). Ce sont les scènes avec Martine Carol qui eurent le plus à souffrir de ce montage imposé.

Toutes les séances de désamorçage furent tournées sous la direction technique de Gerhard Robiger, chef du service de déminage de Berlin-Ouest (il désamorça de ses mains près de huit mille engins!). Robiger affirmait que dix pour cent des bombes lâchées sur la capitale allemande n'avaient pas explosé au moment de leur chute. Quinze années plus tard, à l'époque du tournage du film qui eut lieu entièrement dans les quartiers encore en ruines de Berlin, il était courant de découvrir une moyenne de deux bombes non explosées par semaine...

Après LE GRAND COUTEAU (1955) et ATTAQUE (l956), deux de ses meilleurs films, Jack Palance retrouvait ici Robert Aldrich pour la troisième et dernière fois.


1959 THE ANGRY HILLS (Trahison à Athènes)

Réalisateur : Robert Aldrich
Genre : Film d'espionnage
Origine : Grande-Bretagne
Durée : 1 heure 55 minutes
Musique : Richard Rodney Bennett

Avec : Robert Mitchum (Michael Morrison), Donald Wolfit (le sénateur Stergiou), Elisabeth Mueller (Lisa Kyriakides), Stanley Baker (Conrad Heisler), Gia Scala (Eleftheria), Sebastian Cabot (Chesney), Theodore Bikel (Dimitrios Tassos), Peter Illing (Leonides)

Pendant la Seconde Guerre mondiale, un correspondant de guerre américain tente de quitter la Grèce en emportant des renseignements destinés aux Alliés.

En 1941, l'armée allemande déferle sur la Grèce. Michael Morrison, un correspondant de guerre américain, arrive à Athènes. Un dirigeant grec, le sénateur Stergiou, lui confie une liste des principaux responsables de la Résistance locale. Il le charge de la remettre aux chefs de l'Intelligence Service, à Londres. Morrison accepte, moyennant des «frais de mission» s'élevant à vingt mille dollars. Le chef de la Gestapo, Conrad Heisler, aidé par le traître Dimitrios Tassos, met tout en oeuvre pour l'empêcher d'accomplir sa mission et récupérer la liste. Morrison se lie avec un groupe de résistants grecs, auquel appartient la belle Eleftheria...

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"Correspondant de guerre américain en Grèce, Mitchum se trouve engagé malgré lui dans la seconde guerre mondiale. Il s'en tirera à coups de beignes. Mi-film de guerre, mi-film d'aventures. Pas mal."
Pascal Mérigeau - Téléobs

1961 THE LAST SUNSET (EL PERDIDO)

O'Malley, coupable de meurtre, est poursuivi par le shériff Dana Stribling. Alors qu'il fuit vers le Mexique, O'Malley décide de rendre visite à Belle Breckenridge, qu'il a aimée, seize ans plus tôt. Quand il la retrouve, il apprend qu'elle est mariée et qu'elle a une fille de seize ans, Missy. John Breckenridge, un ivrogne et un lâche, cherche des hommes pour conduire son troupeau jusqu'au Texas. O'Malley accepte, contre le cinquième de son troupeau. Quand Stribling le rejoint, O'Malley lui propose de reprendre son ancien métier de cowboy et de l'aider à conduire le troupeau jusqu'à la ville où il est justement recherché pour meurtre!
Le voyage commence, les incidents sont nombreux. John Breckenridge est tué au cours d'une rixe dans un bar; Stribling tombe amoureux de sa veuve, Missy est irrésistiblement attirée par O'Malley. Les deux hommes en viennent peu à peu à s'estimer et à se respecter. Ils tuent trois bandits qui voulaient enlever les deux femmes. Alors qu'ils sont attaqués par des Indiens, O'Malley leur donne un cinquième du troupeau, sa part ! A la fin du voyage, Stribling souhaite que O'Malley s'enfuie. Belle donne une fête : Missy avoue à O'Malley qu'elle l'aime. Mais O'Malley apprend de Belle que Missy est sa fille ! O'Malley provoque en duel Stribling qui tire et le tue. Le revolver d'O'Malley était vide !

El Perdido (The Last Sunset, États-Unis, (1961))
Durée : 1h52.
Réalisation : Robert Aldrich.
Scénario : Dalton Trumbo.
D'après le roman " Sundown at Crazy Horse " de Howard RIGSBY
Directeur de la photographie : Ernest Laszlo (Eastmancolor).
Musique : Ernest Gold.
Décors : Olivier Emert.
Costumes : Norma Koch. Montage : Edward Mann et Michael Luciano.
Direction artistique : Alexander Golitzen.
Production : Eugene FRENKE, Edward LEWIS / Bryna Production.

Rock HUDSON Dana Stribling
Kirk DOUGLAS Brendan O'Malley
Dorothy MALONE Belle Breckentidge
Joseph COTTEN John Breckenridge
Carol LYNLEY Missy Breckenridge
Neville BRAND Frank Hobbs
Regis TOOMEY Milton Wing
Rad FULTON Julesburg Kid
Adam WILLIAMS Bowman
Jack ELAM Ed Hobbs
John SHAY Calverton
Margarito DE LUNA Jose
Jose TORVAY Rosario

ANECDOTES

En 1960, Kirk Douglas, en tant que producteur (la Bryna) demandait à Dalton Trumbo d'écrire le scénario de SPARTACUS, d'après le livre d'Howard Fast. C'était un acte courageux, puisque depuis les années 1950, Dalton Trumbo, l'un des " Dix d'Hollywood ", victime du MacCarthysme, ne pouvait plus travailler sous son vrai nom et n'avait plus d'existence " officielle". C'était pourtant l'un des meilleurs scénaristes d'Hollywood A partir de 1960, Trumbo fut notamment le scénariste d'EXODUS, de ce film et de SEULS SONT LES INDOMPTÉS de David Miller, l'un des films préférés d'Issur Danielovitch (le vrai nom de Kirk Douglas) qui interprétait et produisait ce film.

Robert Aldrich, après sa période faste des années 1954-1956, connut des instants difficiles, obligé de tourner en Europe après ses ennuis avec la Columbia pour RACKET DANS LA COUTURE (1957). En 1962, le succès de QU'EST-IL ARRIVÉ A BABY JANE ? devait le remettre définitivement en selle.

Kirk Douglas avait d'abord songé confier le rôle de Belle à Lauren Bacall. Après lecture du scénario, Lauren refusa, reprochant même à Douglas de le lui avoir envoyé.

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Analyse sur le film - Critikat

"Western crépusculaire, secret, complexe, donc beau.De tous les westerns de Robert Aldrich, El Perdido (The Last Sunset) est sans doute le plus secret, le plus complexe, donc le plus beau. Chaque incursion du cinéaste dans ce genre "américain par excellence" est un jalon important dans sa carrière, exprime une des différentes facettes de son art : la conscience politique dans Bronco Apache, le baroquisme dans Vera Cruz, la vulgarité dans Quatre du Texas, le désenchantement dans Fureur apache, l'humour picaresque dans Un rabbin au Far West. Autant de titres essentiels (à l'exception du médiocre et lourdement parodique Quatre du Texas) qui accompagnent, des années 50 à 70, le cinéma américain dans ses métamorphoses esthétiques et thématiques. El Perdido est à la fois un film-somme qui récapitule ses principaux succès des années 50 et un chef-d'œuvre qui dévoile dans le cinéma d'Aldrich des perspectives nouvelles et particulièrement ambitieuses qu'il explorera lors de deux décennies suivantes. El Perdido ne jouit pas d'une réputation exceptionnelle. Tourné à la veille du triomphe de Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?, lors d'une période difficile pour Aldrich­ il avait dû s'exiler en Europe ­, le film souffrit des conflits incessants entre le cinéaste et son producteur vedette, Kirk Douglas, et du faible intérêt du scénariste Dalton Trumbo. El Perdido est pourtant un western admirable, "crépusculaire", pour paraphraser son titre original. Aldrich renonce délibérément aux grands espaces et aux chevauchées spectaculaires pour réaliser un western intimiste et violent, centré autour de personnages complexes et tourmentés, rongés par le remords, la lâcheté, sans parler du désir sexuel et de la perversité qui vont peu à peu contaminer l'œuvre aldrichienne. Si Aldrich est un nom important du cinéma américain néoclassique, aux côtés de Sam Peckinpah et Richard Fleischer, il est possible que ce beau western soit le titre idéal pour (re)découvrir une filmographie placée sous le signe de la démesure."
Les inrocks

"Réalisé en 1961, El Perdido n'a pas la réputation des autres westerns de Robert Aldrich, celle de Bronco Apache ou de Vera Cruz (tous deux de 1954) qui firent du cinéaste un des noms les plus importants de la génération hollywoodienne d'après-guerre. Ce faux western, qui se moque des enjeux fondamentaux et mythologiques du genre, a la beauté fragile des œuvres mal aimées.
Dans une bourgade mexicaine, O'Malley, (Kirk Douglas), un cavalier solitaire tout de noir vêtu, retrouve une femme (Dorothy Malone) qu'il a aimée quinze ans plus tôt. Celle-ci est mariée à John Breckenridge, un ancien officier sudiste alcoolique devenu éleveur de vaches (Joseph Cotten). Breckenridge convainc O'Malley de conduire son troupeau au Texas et se joint au convoi avec sa femme et leur fille (Carol Linley) ainsi qu'un homme de loi, Dana Stribling (Rock Hudson), bien décidé, une fois la frontière passée, à arrêter O'Malley pour un meurtre que celui-ci aurait commis.
El Perdido semble retrouver un schéma souvent adopté dans d'autres œuvres du genre comme La Rivière rouge de Howard Hawks ou Les Implacables de Raoul Walsh, celui du transport de bétail, du voyage à travers les grands espaces à conquérir tout en venant à bout des embûches naturelles et humaines. Mais l'odyssée vécue par les personnages relève moins d'une conquête de l'espace que d'une manière d'éprouver et de sentir se transformer, dans la durée du trajet, ses propres sentiments.
Un trio de malandrins, uniquement guidés par l'avidité sexuelle et qui se font engager dans la troupe afin d'enlever les deux femmes du convoi, désigne l'enjeu central du film, celui de la possession amoureuse. Dès lors, Aldrich met en scène une sorte de concerto élégiaque des sentiments pour quatuor.
Si le récit se passe essentiellement en plein air, les plans en extérieur alternent avec des plans en studio, artificiels et clinquants. Cette hétérogénéité confirme ici l'expressionnisme heurté du style d'Aldrich. Une manière de rappeler que les enjeux sont intimes, abstraits, cérébraux, et que le récit épique du western cède la place à la plainte mélancolique d'un beau mélodrame crépusculaire."
Jean-François Rauger - Le monde

1962 SODOM AND GOMORRAH / SODOMA ET GOMOR (SODOME ET GOMORRHE)

Sous la conduite de Loth, les Hébreux, épuisés et affamés, en quête d’une terre d’accueil, arrivent près de Sodome, dont la principale richesse est le sel. Ils s’installent sur l’autre rive du Jourdain, avec interdiction absolue de pénétrer dans la cité dépravée. La reine Bera règne sur Sodome et Gomorrhe avec son frère Astaroth, qui fomente sans cesse des complots contre elle. En cadeau de bienvenue, Loth reçoit Ildith, l’une des favorites de la reine ; il s’oppose à Astaroth, qui voulait s’emparer d’esclaves réfugiés chez les Hébreux. Sheeah, l’une des deux filles de Loth, s’éprend d’Astaroth. Celui-ci parvient à conclure une alliance avec la tribu nomade des Élamites pour attaquer les Hébreux, qui ont entrepris la construction d’un barrage. Mais grâce à un mur de feu puis à la rupture du barrage, Loth extermine les assaillants jusqu’au dernier.
Le temps de reconstruire leur camp brûlé par l’ennemi, les Hébreux doivent accepter l’hospitalité de la reine. Malgré les mises en garde d’Ishmael, fiancé à Maleb, l’autre fille de Loth, celui-ci se laisse séduire par la vie facile de la cité. Au cours d’un festin, la reine le nomme Premier ministre. Ishmael, qui avait tenté de faire libérer des esclaves, est jeté en prison. Jaloux de Loth, Astaroth lui révèle qu’il est l’amant de ses deux filles. Loth le tue sur-le-champ et rejoint Ishmael en prison.
Là, Jéhovah, qui va détruire Sodome et Gomorrhe le soir même, lui promet de le sauver, lui et son peuple, s’il trouve au moins dix justes. Avant de partir, Loth recommande de ne pas se retourner sous peine d’être changé en statue de sel. Mais Ildith désobéit et subit la colère divine. Désormais, Loth conduit seul son peuple.

Réalisation Robert ALDRICH, Sergio LEONE (1962)
Scénario Hugo BUTLER, Giorgio PROSPERI
Directeurs de la photographie Silvano IPPOLITI, Mario MONTORI, Cyril KNOWLES
Effets spéciaux Lee ZAVITZ, Serse URBISAGLIA,Wally VEEVERS
Musique Miklos ROSZA
Décors Ken ADAM
Costumes Giancarlo BARTOLINI SALIMBENI
Production Titanus Production / Embassy
Distribution Consortium Pathé
Durée 154 minutes

Stewart GRANGER Loth
Pier ANGELI Ildith
Stanley BAKER Astaroth
Anouk AIMÉE La reine Bera
Rossana PODESTA Sheeah
Claudia MORI Maleb
Rick BATTAGLIA Melchior
Giacomo ROSSI STUART Ishmael
Fédor CHALIAPINE Jr Alabias
Enzo FIERMONTE Eber
Scilla GABEL Tamar
Giovanni GALLIETTI Malik


1962 WHAT EVER HAPPENED TO BABY JANE? (Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?)

En 1920, "Baby Jane" est un enfant prodige; l'idole de l'Amérique fait vivre toute sa famille. Malheureusement son talent disparaît avec l'adolescence et c'est sa soeur, Blanche, qui prend sa revanche en devenant à l'âge adulte une grande actrice et, plus impardonnable encore, en profitant de son crédit pour assurer une carrière honorable à "Baby Jane" qui noie son dépit dans l'alcool et la débauche. Jane en devient incroyablement jalouse.
Au sommet de sa gloire, Blanche a les jambes brisées dans un accident de voiture, accident dont la culpabilité reviendrait à Jane. Depuis ce drame qui condamne la célèbre actrice à l'impotence, les deux soeurs vivent ensemble, retirées de tout. Blanche ne sort jamais et revoit ses anciens succès à la télévision. Jane a dans le quartier la réputation d'être une originale un peu "timbrée" et en souffre. Elle a sombré dans l'alcoolisme le plus noir. Elvira, la femme de ménage, conseille à Blanche de se méfier.
Il est vrai que Jane traite sa soeur de plus en plus brutalement. Blanche est réellement séquestrée, son courrier intercepté. Profitant de l'absence provisoire de Jane, elle parvient à téléphoner à son médecin afin de l'alerter. Mais elle est surprise par sa geôlièren, qui la bat et la bâillonne. Elvira, qui par inadvertance a été le témoin de ces exactions, est tuée par Jane.
Au petit jour, on retrouve les deux soeurs sur une plage déserte. Blanche, mourante, avoue à Jane qu'elle est elle-même responsable de l'accident qui l'a rendue infirme, alors qu'elle tentait d'écraser Jane. Après cette confession, la raison de Jane bascule définitivement ; devant les baigneurs assemblés, elle entonne la chanson de Baby Jane.

Réalisation et production Robert ALDRICH (1962)
Scénario Lukas HELLER
D'après le roman de Henry FARRELL
Directeur de la photographie Ernest HALLER
Musique Frank DE VOL
Production Seven Arts / Associates and Aldrich / Warner Bros
Distribution Warner Bros
Durée 132 minutes

Bette DAVIS Baby Jane Hudson
Joan CRAWFORD Blanche Hudson
Victor BUONO Edwin Flagg
Marjorie BENNETT Della Flagg
Maidie NORMAN Elvira Stitt
Anna LEE Mrs Bates
Barbara MERRILL Liza Bates
Julie ALFRED Baby Jane (enfant)
Gina GILLEPSIE Blanche (enfant)
Dave WILLOCK Ray Hudson
Ann BARTON Cora Hudson
Wesley ADDY Le réalisateur

La carrière de Bette Davis était devenue plus que fragile lorsqu'elle fit la rencontre de Robert Aldrich. "Il y a cinq ans, expliqua-t-elle à la presse, j'ai dû faire passer une annonce dans les journaux professionnels d'Hollywood pour demander du travail. On m'avait complètement oubliée. Ma situation devenait inquiétante et j'avais trois enfants à élever. Pour me remettre à flot, croyez-moi, il m'a fallu du cran. Robert Aldrich m'a donné une seconde chance en me faisant tourner avec Joan Crawford". Bette Davis avait formulé ainsi son annonce: "Ex-star encore bonne à quelque chose accepterait grand rôle".
Henry Farrell, l'auteur de "Baby Jane", organisa une sorte de match-revanche en écrivant une oeuvre d'épouvante intitulée "Hush! Hush! Sweet Charlotte". Robert Aldrich prévoyait en effet d'engager de nouveau le célèbre duo, Bette Davis et Joan Crawford. Mais cette dernière, en cours de tournage de CHUT, CHUT, CHERE CHARLOTTE, déclara forfait et fut remplacée par Olivia De Havilland.
En 1991, David Greene réalisa une nouvelle version du film d'Aldrich pour la télévision, avec Vanessa et Lynn Redgrave (soeurs dans la vie, jouant ensemble pour la première fois), dans les rôles respectifs de Jane et Blanche. Ce remake fut produit par William Aldrich, le fils de Robert.

CRITIQUES

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Autres critiques / Analyses

"Une des grandes réussites d'un cinéaste très étrange et très décalé qui s'embourba maintes fois dans le marécage du cinéma commercial. Ce n'est pas le cas ici. Aldrich met en scène un incroyable crêpage de chignon entre une ex-vedette infirme et sa sœur timbrée, qu'interprètent sans retenue deux grandes stars, Bette Davis et Joan Crawford. Entre grand-guignol et folie, ce regard tératologique sur le métier d'actrice n'engendre pas la mélancolie, à condition toutefois d'avoir du goût pour le grotesque."
Vincent Ostria - Les inrocks

"Robert Aldrich réunit deux monstres sacrés dans un huis clos théâtral sur la jalousie entre deux sœurs. Un jubilatoire exercice pratique sur le camp.
On demande souvent la définition du mot camp. Ce film est une bonne réponse. On pourrait le regarder comme Psychose d'Hitchcock, sorti deux ans plus tôt : on y découvre en effet peu à peu la folie furieuse de Jane Hudson (Bette Davis), ex-enfant star sous le nom de Baby Jane, éclipsée à l'âge adulte par sa sœur, Blanche (Joan Crawford), devenue star à Hollywood. Suite à un accident mystérieux, Blanche a les jambes paralysées. Jane peut donc en faire ce qu'elle veut... Dans ce contexte de vieille névrose recuite, les scènes de terreur s'accumulent. Mais avec une outrance tellement grand-guignolesque que le film échappe à tout réalisme, et s'avère furieusement camp. Exemples ? Bette Davis servant un gros rat à sa sœur dans un service en argent raffiné, avant de pousser des rires de hyène, c'est camp. Bette Davis grimée en vieille petite poupée qui refait ses numéros d'enfance, c'est camp. Les deux actrices qui se haïssaient cordialement sur le plateau sont pour beaucoup dans la réussite camp du film. Surtout Bette Davis qui ne recule devant aucune grimace, balançant des répliques assassines dans le droit fil de son personnage d'All About Eve de Mankiewicz. Aldrich lui a prouvé sa gratitude en lui offrant une sorte de suite deux ans plus tard avec Chut, chut, chère Charlotte. A noter, l'influence du film sur la filmographie de François Ozon : on retrouve le rat cuisiné dans Sitcom, la star en fauteuil roulant et l'humour vachard dans Huit Femmes. Lui aussi aurait sans doute fait des merveilles s'il avait eu Bette Davis devant sa caméra."
Olivier Nicklaus - Les inrocks

1963 FOUR FOR TEXAS (Quatre du Texas)

Une bande de hors-la-loi emmenée par Matson, la terreur de la région, attaque la diligence dans laquelle voyagent Zack Thomas et Joe Jarrett. Ce dernier les met en fuite et profite de la situation pour déposséder Zack d'une sacoche contenant 100 000 dollars. Puis il retrouve son amie Ermaline à l'orphelinat où il fut élevé. Il dépose bientôt son butin dans la banque que dirige Harvey Burden, un escroc qui a aidé Zack à devenir le maître des jeux de toute la ville de Galveston. Apprenant que Joe est en ville, Zack s'arrange pour le rencontrer, mais Matson survient, qui tente de tuer Zack. Joe blesse le bandit et sauve la vie de son rival, avant de rejoindre son amie Maxine Richter, qui dirige " La Maison Rouge ", un bateau qu'il a le projet de transformer en maison de jeux. En accord avec Burden, Zack tente de prendre le contrôle du bateau. En fait, Burden prévoit de doubler Zack en le faisant accuser du naufrage d'un bateau de coton. Mais la manoeuvre échoue et Joe oblige Butden à lui accorder un bail sur le dock où est amarré le bateau. Zack ne l'entend pas ainsi, tandis que Burden imagine de laisser les deux rivaux se combattre pour ensuite tirer les matrons du feu. Le jour de l'inauguration du cercle de jeux flottant, Zack et Joe sont bien décidés à s'affronter. Mais Maxine et Elya, leurs amies respectives, parviennent à les faire s'unir contre Burden et Matson. Celui-ci blesse Joe, mais est tué par Zack. Burden est arrêté et tout se termine par un double mariage.

Réalisation, scénario et production Robert ALDRICH (1963)
Adaptation Teddi SHERMAN, Robert ALDRICH
Directeur de la photographie Ernest LASZLO
Musique Nelson RIDDLE
Décors William GLASGOW
Distribution Warner Bros
Durée 124 minutes

Frank SINATRA Zack Thomas
Dean MARTIN Joe Jarrett
Anita EKBERG Elya Carlson
Ursula ANDRESS Maxine Richter
Charles BRONSON Matson
Victor BUONO Harvey Burden
Edric CONNOR Le prince George
Nick DENNIS Angel
Richard JAECKEL Mancini
Mike MAZURKI Chad
Wesley ADDY Trowbridge
Marjorie BENNETT Miss Ermaline
Jack ELAM Dobie

Et Arthur GODFREY, THE THREE STOOGES, Teddy BRUCKNER and His All-Stars

QUATRE DU TEXAS constitue une parenthèse dans l'oeuvre de Robert Aldrich : lui qui avait signé des classiques du western tels que BRONCO APACHE, VERA CRUZ (1954) et EL PERDIDO (1961), s'amusa avec ce film à parodier le genre, n'hésitant pas à le traiter avec burlesque et démesure.

Les extérieurs du film, tournés dans le désert Mojave, furent photographiés notamment par Burnett Guffey et Joseph Birec, qui allaient s'imposer comme deux des plus grands chefs-opérateurs américains, le second devenant le complice attitré de Robert Aldrich dès son film suivant, CHUT, CHUT, CHÈRE CHARLOTTE.

Victor Buono, acteur à la corpulence aisément reconnaissable, et qui joue ici Harvey Burden, est notamment apparu dans deux autres films de Robert Aldrich, QUEST-IL ARRIVÉ A BABY JANE ? (1962), et CHUT, CHUT, CHÈRE CHARLOTTE (1965), ainsi que dans LES SEPTS VOLEURS DE CHICAGO, de Gordon Douglas (1964), MATT HELM AGENT TRES SPECIAL, de Phil Karison (1966), LA COLÈRE DE DIEU, de Ralph Nelson (1972) et DÉTECTIVE COMME BOGART, de Robert Day(1979).

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1964 HUSH... HUSH, SWEET CHARLOTTE (CHUT...CHUT, CHÈRE CHARLOTTE)

Réception à Hollis House, superbe propriété en Louisiane. Charlotte Hollis, couverte de sang, apparaît soudain devant les invités horrifiés : elle vient d’assassiner son amant, John Mayhew, dont une main et la tête, tranchées au hachoir, ont disparu !
Trente-cinq ans plus tard, en 1964, Charlotte habite toujours à Hollis House; que lui a léguée son père, Sam Hollis, usant de son pouvoir, il a fait innocenter sa fille d’un crime évident aux yeux de tous. Refusant de se soumettre à l’ordre d’expulsion lancé par une entreprise de travaux publics, Charlotte sollicite l’appui de sa cousine Miriam Deering, qui était, à l’époque du crime, la fiancée du docteur Drew Bayliss. Ce dernier soigne Charlotte pour troubles mentaux : elle est convaincue que c’est son père qui a tué John et que celui-ci hante la maison; la nuit, elle joue au clavecin la chanson, «Chut… chut, chère Charlotte», qu’il lui avait écrite…
En ville, Harry Willis, un assureur, enquête : pourquoi Jewel, la veuve de Mayhew, n’a-t-elle jamais exigé la prime prévue au décès de son mari ? Mourante, Jewel lui confie alors une lettre à n’ouvrir qu’après sa mort.
À Hollis House, les rapports se tendent entre les cousines. Approuvée par Drew, Miriam laisse entendre à Charlotte qu’il lui faudra partir. Hystérique, cette dernière accuse Miriam d’avoir, autrefois, averti son père et Jewel de sa liaison avec John. La nuit, sous l’empire des calmants administrés par Drew, Charlotte découvre, sur le plancher du salon, la main de son amant à côté du hachoir. À l’évidence, la pauvre femme perd la raison et il va falloir l’interner. Mais Velma, sa bonne, soupçonne un coup monté par Miriam et Drew, et en avertit Willis par téléphone. Miriam la surprend et la tue. En effet, Velma avait vu juste : Drew et son ex-fiancée complotent de rendre folle Charlotte afin de récupérer ses biens. Ils exhibent à la malheureuse la tête tranchée de John, lui font croire qu’elle a, en plein délire, tué Drew, puis la mettent en présence du «cadavre», bien vivant, de celui-ci ! Croyant leur but atteint, les complices fêtent leur succès sous la fenêtre de la chambre où Charlotte, droguée par Drew, est censée dormir. Mais leur victime, réveillée, fait tomber sur ses tortionnaires une énorme vasque qui les écrase !
Aux grilles d’Hollis House, la foule guette la sortie de la meurtrière. Rassurée sur son état mental, Charlotte monte dans la voiture du shérif. Willis lui remet alors la lettre de Jewel, qui vient de mourir, dans laquelle celle-ci avoue avoir tué son mari, révèle le sinistre complot de Miriam et innocente Charlotte.

Réalisation et production Robert ALDRICH (1964)
Scénario Henry FARRELL, Lukas HELLER
D’après le roman de Henry FARRELL
Directeur de la photographie Joseph BIROC
Musique Frank DE VOL
Production Associates and Aldrich Company
Distribution 20th Century-Fox
Durée 133 minutes

Bette DAVIS Charlotte Hollis
Olivia DE HAVILLAND Miriam Deering
Joseph COTTEN Le docteur Drew Bayliss
Agnes MOOREHEAD Velma Cruther
Cecil KELLAWAY Harry Willis
Victor BUONO Big Sam Hollis
Mary ASTOR Jewel Mayhew
Bruce DERN John Mayhew
Wesley ADDY Le shérif Luke Standish
George KENNEDY Le contremaître

Désireux de rééditer le succès de QU’EST-IL ARRIVÉ À BABY JANE ? (1962), Aldrich proposa de nouveau à Bette Davis et Joan Crawford les deux rôles principaux de ce film. La première accepta sans hésiter; pour remplacer la seconde, malade, le cinéaste prit contact avec Vivien Leigh et Loretta Young, qui se récusèrent. Alors, pressé par Bette Davis, Aldrich se rendit en Suisse pour tenter de convaincre Olivia De Havilland. Celle-ci accepta à la condition que le rôle de Miriam fût récrit pour créer un personnage ambivalent, charmant et odieux à la fois